Du 3 au 5 février 1702, Samos
Île de Samos.
Nous prîmes des chevaux et des guides pour aller à la grande montagne de Catabate qui est à l’extrémité de l’île. Mont Kerkis, Samos, avril 2022.
La chapelle de Cacoperata est une caverne où l’on ne peut entrer que par une espèce de trappe taillée dans le roc. Kakoperato, avril 2022. Photo Frédéric Tintilier.
On y va par un sentier d’environ 300 pas de long, fait de main d’homme dans des rochers escarpés... Kakoperato, avril 2022.
À gauche on a de la peine à s’appuyer sur les roches, à droite ce ne sont que précipices coupés naturellement à plomb... Kakoperato, avril 2022.
" Le 3 février, nous prîmes des chevaux et des guides pour aller à la grande montagne de Catabate [Kerkis 1433m] qui est à l’extrémité de l’île ; on nous mena tout droit à Marathrocampo [Marathokambos] à 8 milles de Carlovassi, et nous passâmes la nuit dans la ferme de Saint-Georges appartenant au couvent de Saint Jean de Patmos ; il n’y a plus que trois ou quatre cellules inhabitées autour de la chapelle de cette ferme.
Le 4 février nous allâmes voir la chapelle, ou pour mieux dire l’hermitage de Notre-Dame de Belle apparence, qui est à quatre milles de là dans un fond commandé 427 par des rochers effroyables ; la solitude est belle, et la chapelle est à l’entrée d’une caverne affreuse ; on y monte par un escalier tout droit, formé par environ trente marches étroites et sans appui du côté du précipice ; on a taillé dans le bas de la caverne un beau réservoir que l’on a soutenu par une forte muraille ; pour aller puiser de l’eau on passe par un corridor qui règne le long d’un abîme très profond ; cette chapelle n’est pas mieux ornée que les autres chapelles grecques.
Nos guides ne voulurent jamais aller plus avant dans la montagne, quelques avantages qu’on leur proposât ; le froid était fort âpre et les mulets seraient morts de faim dans ces déserts : il fallut donc revenir à Marathrocampo pour prendre le chemin d’une autre solitude plus affreuse encore que la première et que l’on a nommée fort à propos, Notre-Dame du mauvais chemin ; nous n’y arrivâmes que le lendemain, après avoir traversé bien des montagnes couvertes de pins, de bruyères, d’arbousiers : cette solitude promettait à notre curiosité des plantes dignes d’être recherchées.
La chapelle de Cacoperata [Kakoperato] est aussi une caverne où l’on ne peut entrer que par une espèce de trappe taillée dans le roc. Les Grecs se plaisent à bâtir des chapelles dans les lieux les moins accessibles, et s’imaginent que ces lieux inspirent plus de dévotion que ceux qui sont dans le beau pays. Cacoperata est assurément un des plus affreux ermitages que j’aie vus de ma vie : on y va par un sentier d’environ 300 pas de long, fait de main d’homme dans des rochers escarpés, et ce sentier n’a que demi-pied de large en quelques endroits ; à gauche on a de la peine à s’appuyer sur les roches, à droite ce ne sont que précipices coupés naturellement à plomb, où un homme serait mis en pièces si le pied venait à lui manquer. " TOURNEFORT 1717