Du 15 au 18 juin 1701, Erzurum
Erzurum.
Vue de la ville d'Erzeron (Erzurum)
Source https://gallica.bnf.fr
Auteur Claude Aubriet
Erzurum, juillet 2025. Photo Frédéric Tintilier.
Erzeron est bâti dans une belle plaine au pied d'une chaîne de montagnes. Erzurum, juillet 2025.
On n’y voit ni arbres ni buissons, et l’on n’y brûle communément que de la bouse de vache dont on fait des mottes. Briques de bouse séchée, environs d'Erzurum, juillet 2025.
Le Janissaire Aga se tient dans une espèce de fort en haut de la ville. Erzurum, juillet 2025. Photo Frédéric Tintilier.
"C'est une assez grande ville à cinq journées de la mer Noire, et à dix de la frontière de Perse. Erzeron est bâti dans une belle plaine au pied d'une chaîne de montagnes qui empêchent l'Euphrate de se rendre dans la mer Noire et l'obligent de se tourner du côté du Midi. Les collines qui bordent cette plaine étroite étaient encore couvertes de neige en plusieurs endroits. On nous assura même qu’il en était tombé le premier jour de juin, et nous étions fort surpris d’avoir les mains engourdies jusqu’à ne pouvoir écrire sur le point du jour : cet engourdissement durait encore une heure après le lever du soleil, quoique les nuits y fussent assez douces & les chaleurs incommodes depuis les dix heures du matin jusques à quatre heures après midi (...).
Outre la rigueur des hivers, ce qu’il y a de plus fâcheux à Erzeron, c’est que le bois y est rare et fort cher. On n’y connaît que le bois de pin que l’on va chercher à deux ou trois journées de la ville, tout le reste du pays est découvert. On n’y voit ni arbres ni buissons, et l’on n’y brûle communément que de la bouse de vache dont on fait des mottes, mais elles ne valent pas celles des tanneurs dont on se sert à Paris, encore moins celles du marc des olives que l’on prépare en Provence.
La ville d’Erzeron vaut mieux que celle de Trebizonde ; l'enceinte de cette première place est à doubles murailles défendues par des tours carrées ou pentagones, mais les fossés ne sont ni profonds ni bien entretenus. Le Beglierbey ou le Pacha de la province, est logé dans un vieux sérail fort mal entretenu. Le Janissaire Aga se tient dans une espèce de fort en haut de la ville (…).
On apporte aussi à Erzeron beaucoup de gales de cinq ou six journées de la ville, et l’on y conserve les chênes avec soin par ordre du pacha ; le bois serait d’ailleurs trop cher si on l’y apportait pour brûler.
Cette ville est le passage et le reposoir des toutes les marchandises des Indes (...) Nous fûmes surpris de voir arriver à Erzeron une si grande quantité de Garance, qu’ils appellent Boïa : elle vient de Perse, et sert pour les teintures des cuirs et des toiles. La Rhubarbe y est apportée du pays d’Usbeq en Tartarie. La semencine, ou la graine aux vers vient du Mongol. Il y a des caravaniers qui de père en fils ne se mêlent que de voiturer les drogues, et qui croiraient dégénérer s’ils se chargeaient d’autres marchandises.
Le 19 juin, nous partîmes pour aller visiter les montagnes qui sont à l'Est de la ville. " TOURNEFORT 1717.